Par Lydia Morel-Bétermin le 24/04/2023
J'ai envoyé ce courriel au Dr Magali Koelman après avoir visionné son exposé sur l'électrohypersensibilité. Sa vidéo est accessible ici.
Cette vidéo aurait dû être diffusée lors de l'Atelier du Parlement Européen : "EHS : État de la Science" du 13 avril 2023 à Bruxelles, organisé par la députée européenne Michèle Rivasi du groupe des Verts/Alliance libre européenne (membre du parti français Europe Écologie Les Verts) mais ne l'a pas été…
Le discours tenu par les médecins et scientifiques, censés être sans conflits d'intérêts, invités à cet atelier, était très stigmatisant envers les personnes électromagnéto-hypersensibles (EHS) et n'avait que pour seul objectif de les médicaliser alors qu'elles ont le statut de personnes handicapées ayant un handicap fonctionnel. A ce titre, elles sont protégées aussi bien au niveau européen qu'au niveau international, notamment par tous les pays signataires de la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations Unies (1993 et 2006). Les droits des personnes handicapées ont encore été affirmés dans la Résolution du Parlement Européen du 13 décembre 2022 "Vers l’égalité des droits pour les personnes handicapées".
Je me réjouis que ma lettre ait attiré son attention, un premier échange constructif a été initié.
Bonjour Mme Koelman,
Grâce à mon réseau de personnes EHS, j'ai pu visionner votre présentation.
C'est en tant que personne EHS, chercheuse indépendante en sciences du vivant et citoyenne engagée depuis de nombreuses années dans la lutte contre les pollutions environnementales (particulièrement contre les champs électromagnétiques artificiels — CEM) que je vous contacte.
Tout d'abord je tiens à vous remercier pour votre présentation (claire, précise, bon historique). Je suis rassurée, vous ne faites pas partie de ces autres médecins présents à cet atelier qui souhaitent nous médicaliser à tout prix et nous forcer à prendre un traitement (au mieux inefficace, au pire délétère), ce qui arrangerait bien les affaires des industriels du secteur des télécoms et du numérique.
J'ai particulièrement apprécié le fait que vous parliez en terme de handicap fonctionnel, et que vous insistiez sur les mesures d'accessibilité que la société devrait mettre en place et sur la défense de nos droits.
En effet, vous avez raison, les EHS conscients, ceux qui ont fait le lien entre la source d'exposition et leurs symptômes, que je requalifie en "électromagnéto-perceptifs" (EMP) ne sont pas des "malades", mais des "personnes". C'est bien l'environnement pollué qui est le "malade" et qui a besoin d'être traité (réduire fortement la pollution électromagnétique, particulièrement celle émanant des infrastructures et objets de technologies sans fils) et non les personnes EHS. Beaucoup de médecins ne comprennent pas la signification du handicap fonctionnel et ils ont été formatés pendant leur formation universitaire, tous comme les biologistes, à penser que toutes les personnes qui ne correspondent pas à la "norme" sont des "malades" ou ont des troubles de santé. La variabilité entre les individus, la diversité au sein de notre espèce, Homo sapiens, semble être une donnée inconnue de la plupart des médecins.
Tout comme vous, je m'intéresse à la médecine environnementale depuis de nombreuses années. J'ai découvert les syndromes (et non les pathologies) environnementaux lors d'une conférence internationale donnée à l'Assemblée nationale française à Paris en octobre 2014 "Crise sanitaire des Maladies Chroniques : les maladies environnementales émergentes nous alertent". Je m'intéressais déjà depuis 2012 à la toxicologie environnementale, notamment à la contamination aux métaux lourds (adjuvants des vaccins, amalgames dentaires…).
- Tous les médecins et thérapeutes que j'ai pu entendre ou rencontrer dans des conférences ou au sein d'associations confirment bien la réversibilité des symptômes ainsi que celle des marqueurs biologiques, lorsque la source d'émission des CEM est enlevée ou que la personne se retire, ce qui exclut de facto le fait qu'il s'agisse d'une pathologie.
Il ne faut pas confondre les symptômes, la perception clinique, déclenchés par ces CEM et les effets biologiques au niveau cellulaire et moléculaire qui sont insidieux et imperceptibles. Tout le monde, de même que tout le vivant dans son ensemble, est impacté par ces radiations indépendamment du fait de les ressentir consciemment ou pas, comme l'ont montré des milliers d'études scientifiques parues dans des revues à comité de lecture. Mais la douleur causée est différente d'un individu à l'autre, comme le sont par exemple les différences de sensibilité au froid et à la chaleur.
Quelques précisions et clarifications :
- L'affirmation selon laquelle tous les individus ne sont pas égaux d'un point de vue biologique (lorsque vous parlez d'électro-chimico hypersensibilité par exemple) me paraît fausse.
Les personnes EHS et/ou MCS sont différentes. Elles ont une plus grande capacité de détection des champs magnétiques, EM et électriques (et des produits chimiques) que la moyenne de la population. Il s'agit donc d'une capacité et non d'une faiblesse.
Les réactions d'évitement sont de saines réactions par rapport à un agent physique toxique (les radiations).
Cela signifie que les personnes sont électromagnéto-"hypersensibles" de naissance. Leur électromagnéto-hypersensibilité leur a été révélée à cause de l'environnement pollué par les CEM artificiels, bien souvent à la suite d'une sur-exposition involontaire aux micro-ondes pulsées (par ex. mise en place de la wifi sur le lieu de travail). Si nous vivions dans un environnement non pollué, ces personnes ne pourraient pas être conscientes de leur électromagnéto-hypersensibilité.
Les personnes EM-"perceptives" sont souvent en meilleure santé que les personnes électromagnéto-hyposensibles puisque, grâce à cette sorte de système d'alarme naturel, elles évitent autant que possible les lieux pollués, portent des vêtements de protection et n'utilisent plus (ou rarement) les technologies sans fils. La majeure partie des personnes EMP que j'ai rencontrées avaient un usage modéré de leur téléphone mobile. Une minorité a résilié son abonnement pour être en cohérence avec leur connaissance du vivant et leur combat contre la pollution EM – c'est également mon cas ainsi que mon conjoint, ingénieur en informatique. Nous avons toujours été relié en filaire pour notre connexion internet et pour notre réseau local à l'intérieur de notre domicile.
- Affirmations erronées empruntées aux concepts théoriques de l'immunologie entendues chez plusieurs personnes (EHS et non-EHS) : allergie aux ondes, rupture du seuil de tolérance face aux CEM.
Les personnes EHS ne sont pas "allergiques aux ondes".
De même, nous ne pouvons pas parler de "rupture du seuil de tolérance aux CEM pour les personnes EHS". Homo sapiens, tout comme les autres être vivants, n'est pas doté pour se défendre contre ces radiations artificielles. L'électricité n'existait pas avant le 19ème siècle. Notre organisme ainsi que celui des autres espèces a évolué depuis des millions d'années (des milliards, des centaines de millions d'années depuis l'apparition des premiers micro-organismes sur la planète) sans aucune pollution.
- Je remets en cause les concepts de "prédisposition" ou "susceptibilité" génétique/épigénétique (ou physiologique/anatomique…) que j'ai appris pendant mon parcours académique car il sous-entend que c'est l'individu qui a un problème ou une différence par rapport à la "norme" alors qu'il faudrait plutôt se concentrer sur l'environnement, notamment sur la toxicologie environnementale.
Certaines personnes EMP peuvent être malades comme tout autre individu. Notamment, une partie des personnes rencontrées dans les associations souffraient d'une intoxication aux métaux lourds. Cette dernière amplifie les symptômes causés par les CEM et en génère d'autres (par ex. une infestation chronique d'origine bactérienne et/ou fongique ou infection virale). Cette intoxication aux métaux et ces infestations micro-organiques ont pour effet de retarder la réversibilité des symptômes dus à une exposition aux CEM.
Problématique d'acceptation de sa différence physique :
Personnellement, je me considère comme chanceuse d'avoir cette capacité, c'est un peu un super-pouvoir, même si je souffre tous les jours de cette pollution (et de l'exclusion sociale). Cela m'a permis de protéger ma santé (et celle de mon conjoint, non-EHS). Cela m'a permis de faire des recherches en biophysique, d'accroître mes connaissances sur différents domaines, de terminer mon désendoctrinement par rapport à l'enseignement ou plutôt le bourrage de crâne reçu à l'université et de devenir plus autonome dans la gestion de ma santé. Cela m'a permis de devenir plus critique par rapport à cette civilisation techno-capitaliste et ainsi de remettre en question plusieurs choix de société, notamment en matière technologique.
Apparemment, je ne suis pas la seule à bien assumer ma différence. Je cite les propos d'une adolescente anglaise de 13 ans (extrait d'un document PDF de l'association PHIRE pour "Physicians' Health Initiative for Radiation and Environment") de août 2022 :
"EHS has dramatically affected my life, but maybe not in the ways you might think. Of course there are places I can’t go, or things I don’t have, but I live a very “normal” life in most ways. I can message my friends through email or Skype on a hardwired system as long as I don’t spend too long and I can go to school now that I have one without Wi-fi and mobile phones. […] I can feel things and sense things most people can’t. This has protected my health, and I like to think of it as a superpower. Of course sometimes, when I can’t sleep, or can’t go to school, it doesn’t feel like that, but in my stronger states, I recognise that it is kind of amazing."
Je me sens même fière d'être EHS, car cela m'a permis de dépasser mes limites. C'est en effet un challenge de s'assumer pleinement lorsque l'on est électromagnéto-hypersensible et que l'on a renoncé à l'usage du téléphone portable dans une société ultra-connectée. Les industriels et les autorités complices ont tout fait pour que les individus deviennent dépendants aux gadgets sans fils. Il faut, en effet, beaucoup de courage, de volonté pour s'assumer et résister à la pression sociétale. Il faut également être curieux et s'intéresser aux solutions techniques alternatives.
Par conséquent, j'ai n'ai pas eu de problème pour faire mon "coming-out" auprès de mes relations et/ou de rencontres fortuites. C'est l'occasion d'expliquer l'EM-perceptivité, de sensibiliser sur la toxicité des technologies sans fils et de les encourager à réduire leur "consommation".
Malheureusement, je constate que les personnes EMP qui s'assument sont minoritaires. La situation s'est même détériorée ces dernières années en raison de la très forte pression sociale du "tout connecté, tout le temps" (renforcée avec l'arrivée de la 5G) et parallèlement de l'uniformisation du comportement des individus (amplification du phénomène de suivisme aggravé par les réseaux sociaux).
En effet, parmi les personnes EMP que j'ai rencontrées dans les associations et celles qui m'ont répondu lors de mon enquête, une partie m'a dit ne pas assumer ou ne pas accepter d'être électrohypersensible, malgré mes explications scientifiques et l'image positive que j'en donnais. Certaines ont honte de leur différence physique. La majeure partie de ces personnes avaient toujours leur téléphone portable et vivaient très mal le fait d'être rejetées par la société (famille, amis, collègues, perte d'emploi ou emploi aménagé moins bien rémunéré et moins intéressant etc). J'ai constaté que les hommes avaient plus souvent du mal à s'assumer que les femmes. Tous les individus n'ont pas la volonté et la force de lutter contre la pression sociale, comme cela a été malheureusement démontré pendant le "corona-circus".
Toutefois, il est scandaleux et inacceptable qu'un administrateur d'association qui vit mal sa propre condition (et/ou qui a des difficultés financières) entraîne tous ses membres dans une stratégie dangereuse pour le sort des personnes EHS et contreproductive en matière de réduction de la pollution électromagnétique, comme le fait de demander aux autorités la reconnaissance de l'électromagnéto-hypersensibilité en tant que pathologie. Ainsi c'est la porte ouverte aux traitements médicaux (y compris psychiatriques), mais aussi à l'internement de force des personnes EHS, comme cela s'est déjà fait dans le passé pour les personnes ayant un handicap mental ou comme cela se fait malheureusement toujours pour des personnes autistes ou considérées comme indésirables par la société. Une fois que les personnes sont déclarées irresponsables, elles perdent tous leurs droits civiques.
Faire passer les personnes EHS pour des malades, c'est un tour de passe-passe habile qui empêche toute action juridique à l'encontre des industriels et des autorités complices. Ces derniers pourront continuer à développer et imposer leurs marchandises mortifères à la population, afin de réaliser leur objectif d'une société (et Planète) complètement digitalisée dans moins de 10 ans (Agenda 2030 de la Commission Européenne).
Certaines personnes EHS, plus facilement influençables, peuvent être aussi manipulées par le discours du médecin d'autant plus si ce dernier est un "Professeur"…
Il faut demander aux autorités de reconnaître les CEM, particulièrement les micro-ondes pulsées, comme pollution environnementale forte.
Demander la reconnaissance officielle de l'EHS comme handicap fonctionnel ne change rien à la situation des personnes si cela ne s'accompagne pas d'obligation à faire appliquer les mesures d'accessibilité dans les espaces ouverts au public. Je vis en Suède depuis près de 2 ans et demi, je constate que la situation des personnes EHS est pire qu'en France (aucune mesure d'accessibilité, droits bafoués en permanence, aides financières de l´État, via les régions et les communes, en forte baisse depuis de nombreuses années…). Les personnes EHS sont encore plus invisibilisées en Suède par rapport à la France. J'ai pu en faire la désagréable expérience, mon conjoint et moi-même avons été choqués par l'apparente ignorance de la population et leur désintérêt à notre égard, de même par leur ignorance face à la toxicité des CEM artificiels. Nous pouvons nous interroger sur ce qu'ont fait les associations suédoises pendant les 20 dernières années…
Face à la situation d'extrême souffrance des personnes EHS, de leurs conditions de vie très difficiles, face aux effets sanitaires (y compris mentaux) délétères sur le reste de la population, face à la destruction des autres espèces vivantes, face à l'urgence sociale, humanitaire, sanitaire et écologique, le principe de précaution est complètement dépassé, la société doit prendre des mesures immédiates et fermes. Cela doit passer par une interdiction des technologies sans fils, tout comme cela a été fait pour celle de fumer dans les lieux publics.
Si la population la plus concernée, notamment les victimes des technologies sans fils, ne peut même pas compter sur une minorité de politiciens (et de médecins) pour mettre en place un plan de démantèlement, alors ces citoyens le feront eux-mêmes avec l'aide de quelques soutiens, comme cela s'est déjà vu à la campagne dans plusieurs pays, avec le risque de subir les représailles des autorités et du reste de la population. La passivité des politiques et des médecins est non seulement condamnable mais irresponsable.
La création de zones blanches ne représente en aucun cas une solution pour les personnes EHS. Non seulement elles pourraient se transformer en ghettos, mais elles pourraient évoluer en camps de concentration, si elles sont pourvues d'un centre médical. L'article de Jutta Lindert, Yael Stein et al. "The Role of Psychiatrists and Physicians in Nazi Programs from Exclusion to Extermination, 1933–1945." (Public Health Rev 34, 8 (2012) — https://doi.org/10.1007/BF03391660) nous montre clairement et nous rappelle comment les évènements se sont passés pour les Juifs et les autres minorités persécutées par les nazis, en passant de l'isolement, l'ostracisation, les insultes, au ghetto, puis au camp de concentration pour finir en camp d'extermination (voir le tableau p. 11–13).
Il me semble que depuis plusieurs années nous assistons à une suite d'évènements, dont les personnes EHS sont les nouvelles victimes, qui ressemblent étrangement à ceux qui se sont déroulés pour les personnes juives dans la première moitié du XXe siècle. Il est grand temps de mettre un terme à ce sinistre scénario.
Comme vous, je pense que les centres de soins, y compris les cabinets médicaux, doivent être les premiers lieux à montrer l'exemple en interdisant les technologies sans fils afin de les rendre accessible aux personnes EHS. Les médecins doivent montrer l'exemple à leur patientèle (signalétique indiquant un environnement sain, dépourvu de technologies sans fils et feuille informative sur la toxicité des CEM). Leur comportement devrait être aussi exemplaire dans leur vie privée, cela permettrait d'augmenter leur crédibilité. De nombreux médecins souffrent tout autant que leur patientèle d'une forte dépendance ou addiction aux gadgets sans fils. Je pense qu'il faut briser le tabou à ce sujet.
J'espère que nous aurons l'occasion d'échanger plus en détail sur le sujet.
Bien cordialement,
Lydia Morel-Bétermin
Independent researcher in Life Sciences
EHS-MCS and proud
M.Sc. in Molecular and Cell Biology, specialization in Immunology (Paris 6, 2008)
M.Sc. in Biological Anthropology and Prehistory (Bordeaux 1, 1996)
M.A. in Archaeology (Paris 1 and Frankfurt a.M. – Seminar für Vor- und Frühgeschichte, 1995)
Master’s Degree in International Trade in Wines and Spirits (Dijon, 2000)
Lydia Morel-Bétermin
Lekebergs kommun
Sverige
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